La grande aventure chinoise des belges - Jo Gerard - impecca

Broché / 208 pages / édition de 1981
langue(s) : français
éditeur : Wesmael-Charlier
dimensions : 230 (h) x 154 (l) x 11 (ép) mm

Le long silence amer d'une Chine affamée ; des mandarins gras et subtils brodant de leurs chichis cet immense, ce jaunâtre suaire étendu sur un empire énorme mais fragile, voilà les images que l'on se fait de l'Asie avant 1914.
Révoltes des Taipings, des Boxers, incendies, pillages, canonnières débarquant des Français, des Anglais, baïonnette au fusil, morgue colonialiste d'Européens triomphants dans les concessions qu'ils arrachent à cette Chine déchirée, missionnaires barbus et religieuses en cornette cueillant là-bas, comme des marguerites dans un champ de Claude Monet, à pleines brassées, des milliers d'orphelins pour en faire des petits chrétiens enfin sauvés par Jésus et par des bols de riz. Lubricité de la cour impériale, cruauté feutrée, voluptés tordues aux douceurs de soie tiède, on a lu Bodard, ce Jérôme Bosch des derniers potentats asiatiques et An Su Iyn qui sait voir et narrer à sa façon mais sous l'angle d'un marxisme qu'elle croit libérateur. On se plongea dans le «Palanquin des Larmes» auquel on en ajouta quelques unes encore.
On est certain que les Belges, comme d'autres Occidentaux, s'offrirent de larges tranches de Chine et en gonflèrent le portefeuille d'entreprises minières, ferroviaires, métallurgiques où suaient les coolies sous le regard dur et les moustaches en crocs de contre-maîtres wallons ou flamands.
Mais les Jésuites et leur ancien élève Voltaire, mes grands amis Erasme et Renan m'inoculèrent une ironique allergie envers les lieux-communs, les clichés, les vérités admises.
Aussi suis-je parti à la recherche de cette Chine qui s'étire dans l'aube du XXème siècle et se réveille soudain dans le vrombissement des machines, la fumée des trains, le fracas des marteaux-pilons, l'incandescence des pourpres coulées d'acier.
Sans parti-pris, sans préjugés, j'assemblai, pièce par pièce, ce gigantesque puzzle, grâce à la si riche bibliothèque du Musée royal de l'Armée, à ses archives, à ses collections de photos mais aussi en découvrant, dans les papiers des Scheutistes, de curieux documents.
Ainsi, jour après jour, sur les horizons infinis de la Chine se déroula devant moi la grande aventure asiatique des Belges, au temps de Léopold II et au début du règne d'Albert Ier.
J'écrivis ce livre tandis que le Roi Baudouin parcourait la Grande Muraille et que nous recevions au Musée de l'Armée, le chef d'Etat-Major de l'armée chinoise. Ainsi se renouaient à des années de distance, l'étrange idylle de mon pays avec celui de Confucius, de Tseu Yi, la tigresse, de Li Ung Tchang qui fut le Richelieu chinois de 1900 en attendant que sonne l'heure de Sun Yat Sen, cet homme d'acier.


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