Guy de Maupassant - Lettre autographe signée à son

Une lettre inédite de Guy de Maupassant à son photographe Achille Mélandri à propos de son fameux portrait en pied réalisé en 1883.

Guy de Maupassant (1850-1893)
Lettre autographe signée au photographe Achille Mélandri (1845-1905)
1 f., 1 p., 16,4x11cm, encre noire
Cannes, Villa Clotilde, Boulevard du Cannet, sans date [1883-1884]

Maupassant, pourtant connu pour être plutôt rétif à la diffusion de son portrait photographique ou gravé, voire même « photophobe » à l’instar de Flaubert comme le précise Yvan Leclerc dans la revue Romantisme (n°105, p. 97-106, 1999), se dévoile, dans cette lettre inédite, sous un jour plus enthousiaste avec son voisin de la rue Clauzel, le photographe et hydropathe Achille Mélandri (1845-1905) pour qui il a posé en 1883 et à qui l’on doit des portraits fort rares et désormais très recherchés de Sarah Bernhardt, Victor Hugo, Émile Zola, Auguste Renoir, voire même inédit de Léon Bloy (collection Benoît Galland). Maupassant habitait au n°17 de la rue Clauzel, Mélandri au n°19 où il avait son appartement et son atelier, au 5e étage, à côté de celui du père de l’écrivain, Gustave Maupassant (1821-1900). Cette relation de voisinage explique sans doute que cette lettre soit la seule trace d’échange épistolaire désormais connu entre les deux hommes : l’auteur du Horla écrit depuis Cannes, très probablement au début de l’année 1884, où il effectue de nombreux séjours jusqu’au 15 avril, ici à la Villa Clotilde.

"Cher Monsieur,
J’ai reçu les photographies, et je vous remercie. Je trou les trouve fort bonnes ; surtout les deux plus petites.
Je vous demanderai donc de me faire 2 douzaines de chacun des petites et une douzaine de la grande que je vous renvoie.
Je pense que vous avez pu donner une épreuve à M. Barbier que je vous ai envoyé.
Croyez, cher Monsieur, à mes sentiments bien cordiaux et tout dévoués.
Guy de Maupassant"

Le contenu de cette missive a de quoi surprendre si l’on se rappelle que l’écrivain avait érigé en « loi absolue » l’interdiction de la publication de son portrait. Dans une note manuscrite signée, sans date, conservée à la B.M. de Rouen, souvent reproduite en fac-similé, notamment dans l’Album Maupassant, (Pléiade, p. 8), il indique :

Je me suis fait une loi absolue, de ne jamais laisser publier mon portrait toutes les fois que je peux l’empêcher. Les exceptions n’ont eu lieu que par surprise. Nos œuvres appartiennent au public, mais pas nos figures.

L’éditeur Charpentier en fit les frais en 1890 à cause de la reproduction du portrait de l’auteur dans Les Soirées de Médan : Maupassant menaça de faire rappeler tous les exemplaires en stock pour les détruire, mais ne mit jamais sa menace à exécution.

Le portrait en pied de Maupassant réalisé par Mélandri en 1883 ne fut donc destiné qu’à un usage privé. D’ailleurs, la seule épreuve connue est celle que l’auteur de Bel ami adressa, dédicacée, « A Madame la Comtesse Potocka », vendue par nos confrères de la librairie Le Feu Follet, à Paris, il y a quelques années. Plusieurs gravures d’après la photographie furent réalisées, probablement après la mort de l’écrivain qui n'aurait sans doute pas donné son accord !

Paul Vivien, dans l'Hydropathe, dit d’Achille Mélandri qu'il était "bureaucrate, dessinateur, photographe, et journaliste". On pourrait également ajouter sculpteur et inventeur, car il travailla au problème de la "photographie animée", comme Émile Cohl, un co-hydropathe et inventeur du dessin-animé. Il collabora au Tintamarre, où il écrivait des nouvelles sous le pseudonyme de M. Irlande. Son atelier était un lieu de rendez-vous des artistes et des écrivains de l'École militante, de tous ceux enfin qui, selon le mot de Murger, se lancent à l'assaut de l’avenir, comme André Gill, Jules Jouy, Luigi Loir, Georges Lorin.

Document inédit exceptionnel, provenance familiale de l’artiste. Très bel état. En queue de la lettre, Maupassant a écrit "TSVP" (tournez s'il vous plait) sans que rien ne soit pourtant indiqué au verso, à moins que Mélandri n'ait détaché un deuxième feuillet dont nous n'avons pas retrouvé trace.

Envoi soigné, assurance comprise, avec facture faisant office de certificat d’authenticité.